Au milieu des olympiades des sciences de l’ingénieur, les étudiants en DN MADE de Vauban ont restitué leurs travaux de design effectués avec l’appui de l’intelligence artificielle. (Photo Le Télégramme/Steven Le Roy)
L’intelligence artificielle (IA) va-t-elle remplacer l’homme ? Non, enfin pas pour l’instant, à en croire les élèves de première année du DN MADE. Cette formation post-bac prisée, dispensée en trois ans au lycée Vauban, a pour but d’initier les jeunes au design de produit.
Dans le cadre des épreuves de l’année, les enseignants Sylvain Thomas et Philippe Richard ont eu pour idée d’amener leurs élèves à réaliser une étude en se servant obligatoirement de l’IA. « Nous avons imposé la création d’un récipient promotionnel pour une marque bretonne », comme celles pour le cidre, le café, le rhum ou la bière. « Il n’y a pas que Chat GPT, explique Philippe Richard, mais une myriade d’applications comme Firefly qui se trouve dans la suite Adobe et qui correspond au design ». Pour autant, est-ce que la révolution est en marche ?
Créer un récipient promotionnel pour une marque bretonne, tel était le sujet de cet exercice. (Photo Le Télégramme/Steven Le Roy)
Une vitesse record, une bêtise abyssale
Pas sûr à en croire Sylvain Thomas, qui a une idée précise sur l’IA en cette mi-2024. « Si on ne pilote pas efficacement l’outil, il ne se passe rigoureusement rien, dit-il. Pour l’heure, il s’agit simplement d’un grand compilateur qui rend quelque chose de moyen à la suite des données recueillies sur le Net ». En mode automatique, « tout se ressemble et ne peut correspondre qu’à du design discount ».
À lire sur le sujetIA : les défis à surmonter pour la poursuite de son développement
Rien d’excellent, mais une « vitesse que n’a pas l’esprit humain » plus qu’utile. Le bémol reste encore majeur. En omettant de facto « le parti pris de la création, de la sensibilité et de l’émotion humaines », l’IA n’est à ses yeux, qu’« un outil. Une élève l’a d’ailleurs parfaitement exprimé en expliquant que l’ordinateur est bête. Pour autant, cet outil va vite devenir indispensable et nécessite une connexion rapide. Ce que nous n’avons toujours pas au lycée ! ».
Des bateaux bateaux
Sur le plateau des Capucins, au milieu des olympiades des sciences de l’ingénieur, les étudiants restituent leurs travaux en public, « nous avons délocalisé leur oral ici », poursuivent les enseignants. Parmi eux, Sophia, Vivien et Margaux viennent de se plier au jeu. Leur retour sur expérience est mitigé. « Je cherchais du liège car c’est un isolant thermique de qualité et je voulais en entourer ma tasse. L’IA ne m’a proposé que des bouchons », sourit Vivien. Même son de cloche chez Sophia, en quête d’un bateau pour faire le lien entre le rhum des Antilles et la Bretagne sur une coupelle, « mais rien de bien. Que du classique, pas terrible ». L’écueil principal rencontré par les étudiants reste cependant la lourdeur des recherches, et parfois l’absence de pertinence des résultats. « Il faut être archi précis dans les mots-clés, sinon, c’est n’importe quoi. Soit on a des trucs moches, soit des images fantasmagoriques ». Pour un verre à pied, l’IA a proposé des images de verre et de pied. Et pour une main entourant une tasse, « j’ai eu à peu près toutes les maladies du doigt. Moyennement vendeur », se gondole Vivien.
Sophie, Margaux et Vivien ont rapidement trouvé les limites du nouvel outil. (Photo Le Télégramme/Steven Le Roy)
Il faut être archi précis dans les mots-clés, sinon, c’est n’importe quoi. Soit on a des trucs moches, soit des images fantasmagoriques.
Première génération
À l’arrivée, l’IA « est limitée par son universalité et ses limites sont vite découvertes ». Mais les trois étudiants savent bien qu’elle est lancée à la vitesse de l’époque. « Nous avons découvert, nous sommes la première génération à vivre avec elle », disent-ils, conscients d’une rencontre qui ne cessera d’évoluer.